mardi 16 septembre 2008

De Héphaïstos à Thor




Mercredi 3 septembre. Temps frais sur la rade de Cherbourg et moment privilégié car le 1er Groupe de Plongeurs Démineurs est à bord. Ces solides gaillards auraient fait sans nul doute d’excellents navigateurs de l’âge Viking. Leur bâtiment base, le Vulcain, très haut sur l’eau domine la fine silhouette de Dreknor. A mon grand regret je ne peux être à bord mais cela me fera chaud au cœur lorsque quelques jours plus tard, Marco reconnaîtra tout le professionnalisme de ces marins hors pair qui font honneur à notre Royale. Encore une rencontre qui fera date dans l’histoire de notre esnèque.

Cet article est dédié au Major Patrick FORTANER, l’un des leurs, mon ami, pour son extrème gentillesse. Il quittera bientôt Cherbourg pour Brest. Je lui donne d’ores et déjà rendez vous chez les Zef en 2012 lorsque retentira, du coté du petit minou, le vieux norrois "Dreknor siglar far i vikingu" (Dreknor mets à la voile et part en expédition maritime - extrait du poème "sonnet pour des cinglés" avril 2008 jmd)

Maître Principal ISN (R) jm Déant - il y a un an de passage à bord du Vulcain (cliquez sur le titre de cet article)

crédits photos SM Da Silva 1er GPD (cliquez pour les agrandir)



lundi 25 août 2008

Cap au 280° !

Dimanche 24 août 08

Ce début de matinée commence avec du crachin et la météo n’est guère optimiste. Je capelle donc ma salopette et chausse mes bottes. On va faire route dans la boucaille. Comme à son habitude, Tursio vient nous saluer dans la grande rade. Il effectue un impressionnant bond hors de l’eau que souligne l’arc de son dos gris bleuté avant de replonger avec une élégance infinie. Instant fugace qui ponctue la beauté de cette démonstration d’amitié. Un vent d’Ouest établi à 12 nœuds nous apporte une pluie régulière qui fouette les visages. Pour la première fois, Dreknor fait route vers la Hague. La tourelle Nord de Raz Bannes surgit de la brume. Lorsque nous l’aurons par notre travers, nous serons à mi route entre Cherbourg et Omonville la Rogue, principal port de la côte Nord de la Hague, notre destination. La Croix du Sud III, le dundee langoustier navire amiral de l’association les voiles écarlates fait route de conserve avec nous sous grand voile arisée et tapecul. Son grand foc rouge marque sa présence sur un univers de gris infinis où se fondent le ciel et la mer . En fin de matinée, la Hague salue notre arrivée à l’entrée du port d’Omonville avec un fort grain qui fait brutalement chuter la visibilité. Nous nous amarrons à couple de La Croix du Sud qui a pris une des premières bouées. La persistance de la houle incitera Gérard, son patron, a se désolidariser, le tonnage cumulé des deux bateaux provoquant une danse qui pourrait se révéler dangereuse pour les francs bords. Il largue sa pointe et va prendre une autre bouée un peu dans le Sud. Dreknor montre sa longue silhouette sombre qui se détache sur le jade des falaises Haguaises

L’ancienne Osmundivilla a beaucoup de charme et je songe à ce port antique fréquenté à l'âge de bronze par les minoéens qui allaient chercher l'oxyde d'étain sur l’île de Tresco dans les Cassitérides. J’aime à croire que le rusé Ulysse a escalé ici, mythique précurseur des compagnons vikings d’Asmundr. La nuée se déchire, l’embellie s’élargit et inonde de lumière le port du hable. Nous débarquons et prenons d’assaut la terrasse du café du port qui borde la plage. Après quelques heures de repos, nous décidons d’envoyer la toile pour faire route vers Cherbourg et profiter ainsi de la brise de Suroit.

Nos passagers, de sympathiques caennais, seront mis à contribution pour hisser l’espar en tête de mât. C’est un pur bonheur, Dreknor s’équilibre et le speedo nous indiquera une pointe à 6,2 nœuds pour un vent réel de 10 nœuds devant Urville. Plus tard, au Nord de la digue du Homet, une violente risée provoquera un départ au lof qui confirmera mon sentiment que Dreknor est un bateau ardent. Cette belle journée se terminera par la dégustation à bord d’une moque de « Northmen », une agréable bière blanche à l’orge et au blé brassée dans le pays de bray. Quand je vous disais qu’ils étaient sympathiques nos passagers…

vendredi 22 août 2008

A la recherche du byrr

vers la passe de l'Est

le byrr !

au bon plein

Tursio joue avec le safran

Le byrr (prononcez « burr ») est un mot norrois présent dans de nombreux textes. Il désigne le vent favorable permettant de mettre à la voile.

Jeudi 21 août 08

14h00 nous appareillons du quai de l’épi dans l’avant port de Cherbourg où Dreknor est désormais amarré depuis le début du mois d’août. Le temps est maniable par rapport à notre dernière sortie. Nous glissons doucement jusqu’à l’entrée dans la grande rade. Cap bout au vent vers Querqueville et, sans tarder, après avoir largué les garcettes fortement serrées par l’humidité qui a stagné dans la voile carguée, nous entamons la manœuvre de mise en place de l’espar sur le plat bord. Comme d’habitude, la bouline tribord est maintenue raide jusqu’à faire passer l’extrémité de la vergue qui était à l’arrière devant les haubans tribord. Nous virons et à envoyer la toile ! « Ho ! Ho ! » Marco donne le rythme pour hisser. Lentement, la vergue prend de la hauteur et le phare carré se déploie, masquant l’avant dans un premier temps. Nous choquons les bras d’écoute au maximum pour éviter le ballon formé la dernière fois dans la brise. Nous avons 8 nœuds de vent établis, la rade est calme, la manœuvre se déroule sans heurts. A bloc ! c’est la première fois que Dreknor navigue sous voile complètement envoyée sur le plan d’eau cherbourgeois. Nous brassons carré, et commençons un bord de vent arrière qui nous ménera jusqu’à l’entrée de la passe de l’Est. Nous filons 5 nœuds surface, presque 7 sur le fond. Le coefficient de 84 envoie un peu de jus qui porte vers l’île pelée. La voile est bordée et porte bien. Le soleil frappe la girouette et le greiftier lance des étincelles en tête de mât. Thor est avec nous, d’ailleurs n’est ce pas son jour dont nos amis Anglos saxons ont conservé la trace à travers Thursday ? De gros cumulus annonciateurs d’orage se profilent à l’horizon au dessus du cap de Fermanville et confirment la présence de ce Dieu qui détient la foudre…Virement de bord dans le sud du fort de l’Est et nous décidons de sortir en mer pour un bord extérieur le long de la digue centrale. Nous affalons et route moteur vers la passe de l’Ouest. Nous avions un vent apparent d’une dizaine de nœuds vers l’Ouest, sortie de la passe et nouveau virement qui nous inflige un vent réel portant de 4 à 5 nœuds. Nous envoyons, un long bord au vent arrière et au grand largue habille notre tour d’honneur de l’une des plus grandes rades artificielles du monde. Ce n’est pas aujourd’hui que notre réplique du Gokstad montrera toute sa puissance. Je suis maintenant certain que son temps se situe aux alentours de 15 noeuds de vent et d’une force 4 bien établie pour qu’il puisse s’exprimer et qu’on le sente vivre pleinement. Quoi qu’il en soit, la polaire de la voile viking nous permet d’affirmer, sans entrer dans les détails, que pour un modèle du Gokstad dont l’AR est de 0,76, la vitesse sera de 6 nœuds, la dérive 10° pour un vent soufflant à 8 m/s sous un angle de 70 °. Cette polaire indique que c’est un angle de 30° qui donnait la meilleure poussée vélique, le byrr était donc le grand largue. Nous filons à cette allure, tribord amures et le navire s’équilibre parfaitement dans ce petit temps.
Entrée par la passe de l’Est après avoir été déventé par le bout de la digue. Je suggère d’expérimenter une forme latine pour vérifier si nous pouvons remonter un peu au vent. Bascule du bout tribord de l’espar vers le bas et pose d’une estrope vers l’avant, nous créons un point d’amure peu orthodoxe et brassons tout sur babord, la voile porte et, moment rare d’expérimentation archéologique navale, nous constatons la capacité du navire à faire un peu de petit largue, nous flirtons même un peu avec le bon plein quelques minutes mais le bateau, sous l’influence d’un courant traversier, commence à partir au lof et la barre devient totalement inopérante. Nous abattons. Une dernière tentative de petit largue se soldera par un échec à l’entrée de la petite rade le vent ayant adonné au sud, nous ne pouvons rentrer sous voile. Route moteur devant l’étrave du Barfleur qui grossit par notre travers tribord. Tursio, le grand dauphin, viendra quelques instants plus tard faire sa démonstration d’amitié et saluera nos efforts en se frottant sur le safran à plusieurs reprises...

mardi 19 août 2008

Autour du "8"

Le "8" est à bord


Contrairement à leur réputation de guerriers incultes, les Vikings ont donc su développer un art autonome, expressif et complexe, où se mêlent entrelacs, animaux et figures zoomorphes. Il est courant de distinguer plusieurs écoles dont le nom est généralement lié au lieu de fouilles. Les principaux styles sont ceux de BROA (île de Gotland –Suède), de BERDAL(sud-ouest de la Norvège) de BORRE (sur le fjord d’Oslo), de JELLING (Jutland, - Danemark), de MAMMEN (Danemark) ; de RINGERIKE (Norvège) et d’URNES (Sogn – Norvège). Ce dernier rassemble incontestablement les figures les plus élégantes et doit son nom aux superbes panneaux sculptés d’entrelacs du portail de l’église en bois d’Urnes. On trouve un très important nombre de croix et de figures géométriques. Tous ces motifs, qu’ils soient figuratifs ou géométriques s’organisent selon le schéma fondamental du « 8 » qui entraine une suite de combinaisons infinies.

lundi 18 août 2008

Sous le signe de la hache

Motifs géométriques figurant sur la hache de Mammen
Musée national du Danemark Copenhague.

L’Artiste du bord s’est librement inspiré des motifs géométriques figurant sur la hache de Mammen pour décorer le coffre utilisé par votre serviteur. Retrouvée dans une très riche sépulture masculine à Mammen, Danemark, cette hache d’apparat longue de 17,5 cm est décorée d’une fine application de feuilles d’or et d’une damasquinure d’argent qui représente des motifs floraux de tradition scandinave.
Le répertoire de formes des styles vikings se compose de motifs zoomorphes, floraux et géométriques. L’élément zoomorphe est fondamental tandis que les motifs géométriques ont une fonction décorative accessoire, cantonnée aux pourtours des représentations figurées ou élément de remplissage à l’intérieur d’une composition.

samedi 16 août 2008

Loki et les autres

Tête de Loki gravée dans la pierre. Musée de Moesgard. Aahrus Danemark

Le coffre de Loki à bord de Dreknor

Avec cet article, nous inaugurons une série sur les coffres du bord. Tous ont été sculptés par le talentueux Mathieu dont nous parlerons dans un prochain article.



Lorsque nous examinons l’art scandinave de l’époque viking, nous devons constamment garder à l’esprit qu’il ne peut s’agir de créations artistiques au sens de « l’art pour l’art ». Son caractère prédominant est soit d’origine cultuelle ou religieuse, soit purement ornemental, traduisant alors l’exubérance décorative de l’artisanat.
D’une part, il est l’expression plastique d’une prière - sorte de magie propitiatoire pour se concilier la faveur des divinités ou glorifier leurs forces - ou de pratiques liées à la religion.D’autre part, et dans la majorité des cas, l’art viking s’exprime dans la décoration d’objets de la vie quotidienne et met en valeur de somptueux objets d’apparat comme des armes ou des coffres.
A bord de Dreknor de nombreux coffres permettent aux rameurs de s’asseoir et chacun dispose également d’un coffre pour ranger ses affaires personnelles. Chaque coffre étant décoré d’un motif original inspiré de l’art viking, il est ainsi aisé d’identifier ceux attribués à la vie du bord. Loki fait partie de ces derniers puisqu’il s’agit tout simplement de… la poubelle du bord. Loki n’était pas un dieu mais le fils d’un Géant et il semait le malheur partout où il passait, une bonne raison pour le contrôler régulièrement et éviter toute pollution indésirable, non ?

mardi 12 août 2008

Un temps de Viking !


10h30 nous sommes peu nombreux à bord ce matin. Six au total dont le grand Jacques, un solide voileux « boat manager » à bord de Géodis, le 60 pieds Open vainqueur du Vendée Globe le 17 février 1997 après 105 jours de mer et 20 heures, skippé par Christophe Auguin, Granvillais et fétard invétéré capable de tenir debout jusqu’à 6 heures du matin après avoir ingurgité une vingtaine de gin-tonic. Un vrai descendant de Viking ! bref, 12 nœuds de vent en petite rade qui forcit rapidement, Régis me confie la barre, cela commence à fumer dans la grande rade et nous faisons route vers la Ténière puis Querqueville. Le temps de prendre des ris et nous profitons de notre route, bout au vent, pour « ne pas trop souffrir » selon Jacques et préparer la vergue qui est hissée et posée ensuite sur le plat bord. Les boulines et les bras d’écoute sont passés à l’extérieur des haubans. Il va y avoir du sport, d’autant qu’ils ne sont que cinq équipiers à la manœuvre, votre serviteur à la barre ne pourra hélas saisir son Nikon, ayant d’autres chats à fouetter…
Le vent forcit, nous avons 15 nœuds établis, des rafales à 18 – 20 nœuds. Le bateau se comporte bien et il dégage une impression de force et de stabilité peu commune due probablement à son large maître bau. Je prends toute la mesure de l’instant et je me réjouis de voir enfin Dreknor vivre pleinement sa vie. Sa vocation est de naviguer sous voile. J’ai hâte de le voir essayer de remonter au vent. Jacques a l’intention de prendre un point d’amure sur la voile, la transformant ainsi en voile latine telle que nous la montre la broderie de Bayeux. Nous allons vivre une expérimentation d’archéologie navale peu commune. Je tends l’oreille, le CROSS Jobourg envoie un BMS à la VHF (voir ci-dessous) cela commence à piauler. Nous virons et tentative de hisser la voile dans la foulée, un ballon se forme, nous avons trop retenu les bras d’écoute. La manœuvre est délicate et le bateau tend à venir au lof. La barre est très dure, je lui passe un bout avec un nœud de ganse à tête d’alouette, histoire d’éviter les embardées. Le vent continue à forcir. 30 nœuds en rafales qui deviennent de plus en plus régulières.. Nous échangeons quelques mots. Odin semble nous mettre à l’épreuve. Louis nous rejoint à bord de son bateau accompagnateur, la raison l’emporte et nous décidons de ne pas envoyer la toile car trop peu nombreux à bord. En réalité, il manque trois équipiers dont deux aux écoutes. Peu importe, l’expérience aura été enrichissante et nous aura permis de connaître ainsi les limites à ne pas dépasser avec un équipage réduit.

1 - BMS N°108. Avis de grand frais en cours et valable jusqu'au mercredi 13 août à 06h utc. Prolongation probable.2 - SITUATION GENERALE LE MARDI 12 A 06:00 UTC ET EVOLUTIONFlux assez fort à fort de sud-est basculant au sud-ouest généré par une dépression de 990 HPA centrée sur la Bretagne et se déplacant rapidement vers la mer du Nord.3 - PREVISIONS POUR L'APRES-MIDI DU MARDI 12VENT : sud-ouest force 6 à 7 avec rafales.MER : agitée.TEMPS : averses prenant un caractère orageux.VISIBILITE : sup à 5 milles hors grains.4 - PREVISIONS POUR LA NUIT DU MARDI 12 AU MERCREDI 13VENT : sud-ouest force 6 à 7 avec rafales.MER : agitée, loc forte vers le large.TEMPS : nuageux avec averses toujours orageuses en soirée.VISIBILITE : voisine de 5 milles reduite sous grains.

dimanche 10 août 2008

Rencontres sur le plan d'eau Cherbourgeois

Vendredi 8 août 08

Appareillage fin de matinée du ponton Sud de la petite criée. Dreknor se prépare à assister au départ de la troisième étape de la Solitaire du Figaro qui doit être donné à 14h00. Sortie de la petite rade et route vers la zone d’attente spectateurs Est. Le coefficient marée est de 61 - ciel nuageux - 15 nœuds de vent d’Ouest qui adonne vers le Noroit.



Soudain, Tursio le dauphin solitaire (lui aussi) qui a élu domicile en rade de Cherbourg depuis plusieurs semaines fait une première apparition à bâbord. Il semble affectionner particulièrement la longue coque en chêne de notre navire. Il est vrai que son très faible tirant d’eau lui facilite les passages d’un bord sur l’autre et le mammifère se place souvent derrière le safran restant ainsi quelques secondes dans son alignement avant de plonger. Il revient à nouveau s’approchant bâbord arrière, j’en profite pour photographier son évent et je pense déjà à la rédaction d’une fiche d’observation destinée au Groupe d’Etude des Cétacés du Cotentin et des mammifères marins de la mer de la Manche. Ma dernière rencontre avec les dauphins s’est déroulée dans l’archipel des Ecrehous alors que nous faisions route à bord de Soleil Noir vers Ste Catherine à Jersey. Mes pensées vont à chaque fois vers les frères Mayol. Pierre, auteur du roman « les dix rois de la mer » venu à la maison, il y a quelques années, a hélas perdu son fils au large de la Colombie quant à Jacques, « l’homo delphinus » a choisit de partir un jour de décembre 2001 chez lui, à l’île d’Elbe.

Le vent rentre encore et le courant nous porte vers la passe de Collignon. Sous le vent de la digue qui mène à l’île Pelée, la brise distribue ses pattes de chat avec vigueur, partis un peu Nord, nous abattons et je pense qu’il s’agit d’un temps idéal pour envoyer la toile. Dreknor est un bateau puissant et, avec un équipage expérimenté et un bosco capable de coordonner la manœuvre, il devrait monter avec cette force 4 au delà des dix nœuds mettant ainsi Marco dans l’obligation de payer sa moque de cidre !


Sous notre vent, le Charles Marie, ancien chalutier Granvillais ayant appartenu à la grande famille Thélot maintenant reconverti en vieux gréément et affrété par la société Coutainvillaise Esprit grand large se met bout au vent et amène sa grand’voile, ne gardant que son tapecul.
Nous rentrons, fort courant à contre, Serge pousse un peu les moteurs et Dreknor s’engage sans difficulté dans la passe étroite. Cap à l’Ouest et nouvelles rencontres : Cette fois, il s’agit d’un pneumatique du comité de course qui nous aborde par bâbord, le temps pour le binôme présent à bord de se transborder, aimanté par la bouteille de champagne qui leur a été gentiment proposée.
Un deuxième pneumatique rigide, ponté à l’avant, vient sur notre arrière, la station S.N.S.M. d’Urville-Nacqueville vient nous rappeler que Nakki le viking est toujours vivant ! 13h00. Je m’inquiète de ne voir aucun Figaro-Beneteau sortir de Chantereyne. J’appelle la Capitainerie par VHF et nous apprenons qu’il y a report du départ en raison de la situation météo à venir en mer Celtique

jeudi 7 août 2008

L'ombre des Vikings






L’ombre des Vikings plane sur l’édition 2008 de la Solitaire du Figaro. Gildas Morvan, dont la haute stature (1m97) rappelle celle des hommes du Nord, a gagné de fort belle manière la deuxième étape de la course en jouant les écraseurs de crabes. Le skipper a en effet pris des risques en arrivant dans le raz Blanchard, navigant au plus près de la côte entre Goury et le gros du raz continuant ainsi vers l’Est jusqu’à la Plate. L’endroit est particulièrement mal pavé, ce qui lui vaudra d’ailleurs un talonnage. Son audace, digne de Leifr Eriksson, lui aura permis de trouver les contre courants assurant son arrivée victorieuse en rade de Cherbourg.
Demain midi, la flotte quittera le port du nord Cotentin et fera route vers la mer d’Irlande et le canal St Georges. Les concurrents devront faire le tour de l’île de Man, un des hauts lieux de l’âge viking, abordé l’année dernière par Havhinsgten fra Glendalough, la réplique du grand navire découvert dans le fjord de Skudelev au Danemark. Parallèlement au voyage retour de « l’étalon des mers de Glendalough »de Dublin vers Roskilde, où il arrivera samedi prochain, sort l’édition électronique de l’ouvrage collectif « les vikings et l’Irlande », édité en 2001 par Anne Christine Larsen, la dynamique directrice du musée de Roskilde. Ce sont ces mêmes vikings venants d’Irlande qui ont abordé le Cotentin au cours du IXème siècle.
Alors que ces jours-ci, Dreknor promène sa longue silhouette sur la rade de Cherbourg, « les conquérants de Normandie – Caen la mer » skippé par le Granvillais Marc Lepesqueux est aux mains de ses préparateurs. Beaux entrelacs de la longue histoire maritime de notre région…

dimanche 3 août 2008

Une belle annexe

Joanna est ce magnifique bateau en chêne construit par deux charpentiers du musée de Roskilde (Danemark) pendant l’exposition de Lisbonne en 1998 pour démontrer toute l’habileté des Vikings. L’original retrouvé à bord du navire de Gokstad a probablement servi d’annexe au langskip. Long de 6,50 m, sa double paire de rames lui permettant d’atteindre 4 nœuds, En mai dernier, lors de ma visite du musée des navires vikings de Roskilde, sa grande élégance a longuement retenue mon attention et j’avoue que je n’ai pu m’empêcher de rêver d’une telle annexe pour Dreknor…




lundi 28 juillet 2008

Relâche


Dimanche 27 juillet 08

Depuis quelques jours, Dreknor est de nouveau amarré à son quai d’armement port des Flamands à Tourlaville. Clin (si je puis dire) d’œil de Soleil Noir sous grand'voile en fin d’après midi qui, pour l’occasion, a pointé son étrave pour la première fois dans le petit port situé dans la partie Est de la rade de Cherbourg.

dimanche 20 juillet 2008

Marco et Nathalie


Huit ans après que l’idée ait germée dans leurs esprits, Marc et Nathalie Hersent peuvent savourer tout le plaisir d’avoir mené à bien leur projet de construction d’une réplique du navire de Gokstad. « Dreknor, les Vikings et la mer » n’aurait en effet jamais vu le jour sans la présence à Brest 2000 de la réplique d’une chajka cosaque du XVIIème siècle qui les a heureusement inspiré. Au cours de ces derniers jours, « Presviata Pokrova » a croisé le sillage de Dreknor et se repose maintenant dans le bassin du commerce à Cherbourg-Octeville après de longs mois de navigation hauturière en Baltique, mer de Norvège et mer du Nord. L’histoire des deux navires est désormais liée. D’ailleurs ne sont ils pas tous les deux bordés à clins ? un point commun hautement symbolique de ces navires d’exception qui attirent irrésistiblement les regards admiratifs des passants sur le quai. Les Varègues qui jadis ont fait route vers l’Est ont exporté cette tradition nordique qui a traversé le temps. Cet héritage de l’âge Viking est plus que jamais vivant grâce au courage et à la ténacité d’un couple de cherbourgeois hors du commun.

vendredi 18 juillet 2008

Navigation fluviale


14 juillet descente de la Seine

08H40 lancement des moteurs. 09H00 appareillage, Dreknor largue ses amarres et quitte le ponton en face du hangar 106 rive gauche. Le pont Gustave Flaubert passé, il prend sa vitesse de croisière qui restera pratiquement constante une bonne partie de la journée. 10h30 nous arrivons en face de la Bouille, vitesse surface 5,4 nœuds - vitesse fond 6 noeuds
14h00, le S. Lehmkuhl nous rejoint par babord, c’est un norvègien, je le salue en amenant le pavillon national, il nous répond aussitôt et de deux ! je regrette de ne pas avoir eu l’occasion de saluer le Sorlandet mais l’émotion éprouvée lors du salut du Christian Radich lors de son arrivée à Rouen est toujours vivace. Un bon timonier ne peut oublier ces moments particuliers où s’exprime la courtoisie entre gens de mer.
Le coef. De la marée est idéal : 40. Peu de courant, hormis devant Caudebec où nous arriverons babord à quai après avoir dérivé lors de la manœuvre de prise du ponton. Les Granvillais de Strand Hug constateront dans l’embouchure après Quillebeuf que Dreknor marche étonnamment bien, propulsé par ses deux moteurs Volvo de 55CV. A 1500 tours, la barre se fait un peu dure mais lorsque la route du navire est stable, le profil un peu épais du safran latéral ne se fait pas trop sentir. Par précaution, nous avons gréé un palan sur la barre franche pour limiter les embardées lors des virements de bord ou des accélérations moteurs dépassant les 1800 tours.
18h15 Dreknor se présente devant l’entrée du port de Honfleur, ciel d’azur, mer belle, nous sassons peu avant 19h00, les Granvillais à couple à babord. Le patron monte à bord, encore surpris des qualités nautiques de notre langskip, nous échangeons quelques paroles techniques sur les navires bois et sur l’association iroko – chêne. Son cotre a 60 ans et encore de belles années devant lui. Hélas, la Granvillaise quant à elle, rongée par la mérule au bout de 18 ans, n’a pu être présente lors de l’armada 2008. La finesse de sa carène et son élégance se serait particulièrement bien harmonisées avec les lignes pures de Dreknor qui mesurent quelques pieds de plus...
image : extraits de la route suivie par Dreknor plotés par maxsea

mardi 15 juillet 2008

Au coeur de l'Armada de Rouen

5 au 14 juillet 2008
Comment décrire tout l’engouement du public pour Dreknor lors de sa présence à l’armada de Rouen 2008 ? une photo du navire, pourtant difficile d’accès il est vrai, amarré à son ponton habituellement réservé au Belem, montre l’enthousiasme déclenché par sa simple présence. Chaque jour, de nombreux visiteurs n’ont pas hésité à patienter de longues minutes sur le quai pour approcher le langskip prenant ainsi toute la mesure de ce beau projet.

jeudi 10 juillet 2008

Rudhaborg




Depuis le vendredi 4 juillet 08 notre navire est en escale à Rouen. La manœuvre d’accostage rive gauche nous a prouvé, s’il en était besoin, que son tirant d’air associé à la faible hauteur de sa longue quille sont des éléments qui en font un bateau très sensible au vent de travers et dérivant rapidement. Vendredi, il y avait une brise d’aval soutenue qui nous a fait dériver vers le pont de Guillaume. Le lendemain, le Christian Radich, trois mâts norvégien, subira un peu le même sort et s’approchera tous près de l’avant tribord de l’Amérigo Vespucci.
Nous nous sommes donc amarrés au ponton qui aurait du être occupé par le Belem. Ce dernier étant actuellement au Canada, nous avons hérité de son poste d’amarrage disproportionné pour un langskip. Dreknor, bas sur l’eau, disparaît en effet sous la masse du ponton métallique et n’est pas visible du quai. De plus, la coupée menant du quai au ponton est un obstacle supplémentaire de taille pour la bonne circulation du public venant voir le navire. Malgré d’insistantes démarches auprès du port, nous n’avons pu obtenir la coupée supplémentaire, nécessaire au retour du public sur le quai après la visite…Bref, il est malheureux de constater que Dreknor n’a pas été véritablement bien traité à Rouen. Le jarl de l’ancienne Rudhaborg a du se retourner dans sa tombe. Que dire également de l’incompétence notoire du bénévole sur le quai, incapable d’anticiper vivement l’amarrage à l’arrière pour nous éviter de riper sous le vent. Quoi qu’il en soit, je livre à votre réflexion le papier du journal Paris Normandie en date du samedi 5 juillet(ben oui, touchez le pompon avec votre souris pour lire l'article). Ancien de la Royale, j’aurais préféré à nouveau poser mon bonnet sur la tête de la petite sirène à Kobenhavn plutôt que de le voir ainsi à l’envers surmontant les lignes révélatrices de la journaliste passée à bord la veille. Bah ! Oublions tout cela pour ne garder en tête que l’image de Dreknor sous voile photographié en aval du pont Gustave Flaubert par Isabelle Landas, une charmante visiteuse dont la grande gentillesse nous a réchauffé le cœur.

Dreknor bâbord amure en amont des silos à grains se prépare à embouquer le quai menant vers le pont Gustave Flaubert. Photo : Isabelle Landas

mardi 8 juillet 2008

Dans le sillage de Rolf le marcheur






Jeudi 3 juillet 2008

Nous appareillons de Caudebec à 09h30. Ciel de traine et larges embellies pour la journée. Il nous reste un peu plus de 36 nautiques à parcourir dans les boucles de la Seine pour venir nous accoster rive gauche à Rouen. Le flot est avec nous et je calcule que nous devrions mettre un peu moins de six heures.
Les bords de Seine sont magnifiques et à cette époque de l’année ils sont très verdoyants, à certains moments, de hautes collines de jade de part et d’autre constituent un couloir où parfois s’engouffre le vent en fonction de l’orientation des boucles. Nous essayons de jouer avec cette configuration particulière du fleuve pour envoyer ou affaler la voile et faire en sorte que Dreknor apparaisse le plus souvent possible tout dessus. Les enfants rencontrés ici et là s’enthousiasment et agitent leurs petits drapeaux en criant. Un peu plus loin, un touriste norvégien nous salue avec les couleurs de son pays. Un français fait de même à quelques pas de lui. Je songe à cette image des deux pays ainsi unis à bord et me promet d’embarquer ma flamme d’Oslo pour l’agiter à mon tour lors de la descente le 14 juillet, surtout lorsque nous croiserons les trois voiliers blancs, le Christian Radich, le Sorlandet et le Statsraad Lehmkuhl.
Dans l’immédiat, ce sont plusieurs bateaux qui viennent nous doubler à babord et à chaque fois ce sont des échanges de salut ponctués de coups de cornes. Le Grand Turc britannique le premier dont nous rêvons de partir à l’abordage, Le Cisne Branco (cygne blanc) brésilien nous apporte quant à lui sa musique d’outre atlantique, ils jouent sur le spardeck. Un grand moment de plaisr, nous calons notre vitesse sur eux pour profiter pleinement de cette joyeuse ambiance. L’amerigo Vespucci, très haut sur l’eau, mâts de hunes de misaine et de grand mat démontés, nous rattrape également.
Nous passons à proximité de l’abbaye de Jumièges, l’attaque de l’abbaye est bien sur évoquée et nous parlons de ces traces d’incendie encore visibles de nos jours sur ce visage d’une fresque peinte, dont le regard figé pour l’éternité témoigne de la violence de ces temps anciens. Nous abordons bientôt la dernière boucle et nous envoyons au niveau du terminal porte conteneurs de Grand Couronne. Notre présence anachronique surprend les employés des compagnies maritimes qui n’en reviennent pas et leurs chaleureux saluts nous vont droit au cœur. La brise est faible et nous cherchons à faire porter au mieux notre voile qui faseye de temps à autre, déventée lorsque nous lofons un peu trop près de la rive droite. Des pattes de chat nous signalent les risées devant l’étrave, nous apprenons à barrer finement à leur recherche. Le pont Gustave Flaubert apparaît enfin, en aval, sur la rive droite, c’est déjà l’Armada et de nombreuses personnes déambulent sur le quai, l’émotion m’étreint, je ne peux retenir un cri que je veux le plus sonore possible et je hurle, les mains en porte voix un puissant « Rollon, nous voilà ! » sur le pont, tout le monde est surpris et se retourne. Je suis heureux de mon effet de surprise et je suis sur d’avoir été entendu jusqu’à ce coin du parc d’Alesund en Norvège où le premier duc de Normandie possède sa statue offerte par la ville de Rouen, il y a de nombreuses années. Je me revois à ses pieds, j’avais 20 ans et un col bleu sur les épaules…ce raccourci temporel m’émeut. Je suis à bord aujourd’hui, est–ce vraiment un hasard ? Odin veille sur moi. Je passe la barre et me saisit de ma caméra pour figer l’instant où le tablier du pont sera au dessus de nos têtes. Nous sommes le seul voilier à rentrer sous voile, le petit langskip, frêle silhouette parmi les géants, témoigne de ses illustres prédécesseurs et emporte à son bord tout le glorieux passé de ces marins d’exception. Dreknor honore son rendez vous avec l’histoire.

lundi 7 juillet 2008

Entrée en Seine






Mercredi 2 juillet 08

09H00 nous débordons le quai. Régis et Nicolas manœuvrent notre langskip et pointent son étrave vers le sas de sortie. Il y a du jus à la sortie du port de Honfleur. Dreknor vire sur tribord et fait route vers le pont de Normandie. La mer ressemble à du mercure irisé par les rayons du soleil, le ciel est de plomb. Nous entamons la remontée du fleuve vers Rouen. Je suis à l’affut des angles intéressants pour mémoriser ces moments rares par le biais de mon handycam et j’opte pour la contre plongée maxi lors du passage du mat sous le tablier de l’un des plus grands ponts suspendus du monde. Un cargo nous croise et passe à bâbord, son sillage provoque de courtes vagues qui, repoussées vivement par les clins, font chanter la coque et occasionnent un roulis modéré démontrant la grande stabilité de notre navire. Nous passons bientôt devant Quillebeuf, ce village fondé par les vikings se situait à l’époque juste au bord de la baie (du norrois kilboe, le village de la baie) et constituait un point stratégique.
Nous décidons d’envoyer la toile pour saluer dignement l’endroit, désormais fief des pilotes de Seine sur la rive gauche
Les premiers raids vikings sur la Seine remontent à 841 et je ne peux m’empêcher de songer à ces hardis navigateurs, experts en remontées de rivières et de fleuves, qui devaient apprécier la quiétude des flots après une longue navigation hauturière. Il est décidé d'employer les rames pour la première fois et quatre de chaque bord nous tirons en cadence sur le bois mort, notre effort est récompensé par un quatre noeuds sur le fond. Un peu plus tard, nous arrivons devant Caubebec en Caux alors que les grains violents se succèdent et font luire le pont du navire. Le nom Caudebec vient du scandinave kalt bekk signifiant littéralement « froid ruisseau » et une fois amarrés, nous découvrons ce torrent qui parcoure la ville et finit par jeter ces eaux vives juste à proximité du ponton où les curieux commencent à affluer après les averses qui laissent présager un ciel de traine pour la nuit. Nous sommes au poste de séchage ! Les badauds sont avides de renseignements sur cet étrange navire sorti de la nuit des temps, Christopher déploie sa verve habituelle et improvise une conférence au bord du ponton La voile est hissée et Dreknor signe ainsi sa présence un peu en aval du Grand Turc, la frégate britannique construite en Turquie pour les besoins de la série Hornflower sera bordée par un magnifique arc en ciel en début de soirée. Patricia, une jeune femme habitant à proximité du quai aura quant à elle la gentillesse de prendre nos bouteilles d’eau pour les placer dans son congélateur à destination de la glacière du bord. Elle les ramènera le lendemain matin avec une cargaison de croissants…

Canicule à Honfleur







Mardi 1er juillet 2008

Température caniculaire sur les quais d’Honfleur. La tente est à poste sur la vergue et propose un peu d’ombre à Christopher qui travaille sur les poulies de bras d’écoute. 32° ! la ville de Honn le viking n’a rien à envier aux ports méditerranéens. Quelques pas plus loin, est amarré Tuiga, le plan Fife du Yacht Club de la Principauté de Monaco. Ce grand frère de Pen Duick est d’une élégance rare. Un millénaire sépare les deux navires qui attendent le moment propice pour remonter la Seine.
Depuis Caen, Sheila, une californienne partie d’Antigua aux Antilles comme équipière à bord d’un Swann (grand monocoque finlandais) et qui est arrivée à Cherbourg après avoir escalé à Fayal aux Açores, a pris passage à bord de Dreknor. Sheila est une sexagénaire dynamique qui vit à San Francisco. Elle possède une entreprise d’accessoires pour les cycles et fournit notamment Shimano. Sa grande gentillesse et son adhésion à Dreknor en font une passagère appréciée de tous. Dans la soirée, un violent orage n’a altéré en aucune manière la bonne humeur de l’équipage et une excellente ambiance à régné à bord jusqu’à l’endormissement général tard dans la soirée.

dimanche 29 juin 2008

Escale à Caen



Après avoir escalé à Carentan et Ouistreham – le village de l’Ouest – Dreknor a remonté l’orne hier après midi pour venir s’amarrer quai Vendoeuvre dans le bassin St Pierre de Caen. Le fier drekki bouscule le temps et le voir glisser ainsi au milieu des grééments modernes, clin d’œil à l’histoire, nous rappelle qu’un texte de 1025 parle d’un domaine rural, Cathim, sur la rivière Oulne (orne). Le bourg, Darnétal, a obtenu des privilèges de Richard II, afin d’y attirer des habitants. Dreknor, symbole vivant de la région, est ici chez lui et nombre de caennais ont pu l’admirer ce matin avant qu’il ne quitte le cœur de la ville pour rejoindre la mer. La basse vallée de l’orne et Ouistreham, à son embouchure, possédaient de nombreux chantiers navals. Les charpentiers normands, héritiers des techniques de bordage à clins introduites par leurs ancêtres venus du Nord, construisirent ici de nombreuses nefs pour la flotte du duc Guillaume…
Photos : Jean-Claude Girard Normandie Héritage

mercredi 25 juin 2008

Premiers bords






Mardi 24 juin 2008

08h00 Dreknor largue ses amarres et quitte le port des Flamands à Tourlaville. Grand beau temps. Quelques instants plus tard, la passe de l’Est est franchie. Nous sommes en mer pour la première fois et naviguons à 5 nœuds, accompagnés de la Croix du Sud qui nous servira de conserve jusqu’à Barfleur. Nous établissons une liaison VHF sur le canal 72. Les deux navires seront bord à bord à plusieurs reprises et nous échangerons quelques saluts à grand renfort de cornes comme autant de cris joyeux. Je mets en route maxsea ce logiciel de navigation expérimenté à bord de Soleil Noir est riche d’informations et je vois la côte du val de Saire défiler progressivement au rythme de l’avance régulière de notre karv. Mes pensées plongent vers ce temps où les vikings naviguaient dans ces eaux là. Le Cotentin porte trace de leur passage en de maints endroits.
11h30 nous faisons des ronds dans l’eau en attendant le moment propice pour aller nous amarrer au bout du quai à Barfleur. Notre Drekki pointe sa silhouette unique vers le port où Guillaume trouva son pilote pour faire route vers Pevensey en 1066. Dreknor salue le souvenir du Mora, le navire offert au duc de Normandie par sa chère épouse Mathilde. Le soleil écrase le pont, il fait chaud sous le vent du quai, celui-ci est occupé par de nombreux curieux qui découvrent ce navire revenu du fond des âges. Nous débarquons et le pot offert au comptoir de la presqu’île nous va droit au cœur. Le prince des Comores est aux manettes et distribue largement ses bières régénératrices. Première escale et premier ravitaillement en saucisses – frites, nous goutons l’instant présent, départ vers St Vaast après une manœuvre subtile dirigée par Jean-Pierre qui nous permet de pointer l’étrave à nouveau vers le large.
Au large de l’ile de Tatihou nous décidons d’envoyer la toile. Mise en position de la vergue sur le plat bord après l’avoir fait pivoter. Largage des garcettes. Paré à hisser ! le palan de hissage est mis en action, l’effort est important et progressivement les 120 m2 de toile apportent leurs ombres dansantes sur le pont. Réglage des boulines, nous brassons un peu. Nous naviguons au grand largue, les moteurs sont coupés. Silence et perception immédiate du bruit des filets d’eau qui caressent la coque. L’émotion envahit le bord. Le karv retrouve avec bonheur son mode de propulsion naturel. Nous filons 3 nœuds, 3 nœuds et demi dans une petite risée. Le bonheur est sur l’eau. Ces premiers bords se déroulent au large de St Vaast et Quettehou. L’esprit de Ketill, le viking qui a donné son nom à l’endroit, veille sur nous. Pour la première fois, nous sommes dans les conditions identiques à ces hardis navigateurs. Nous réglons les bras d’écoute, le navire glisse sur l’eau, l’orm impose son impressionnante présence. Christopher est à la barre, plus vrai que nature. Le temps est aboli. La magie s’invite à bord…
nota: les photos et illustrations peuvent être agrandies en cliquant dessus

lundi 16 juin 2008

Baptème





Samedi 14 juin 08

« il y a le drapeau Norvégien » souligne M. Bjorn Skogmo. Monsieur l’Ambassadeur Royal de Norvège est visiblement ravi de cette attention particulière. Dreknor a non seulement les couleurs norvégiennes en tête de mat mais le grand pavois présenté dans l’ordre prescrit par l’étiquette maritime déploie ses pavillons et flammes qui flottent sur fond d’azur, caressés par une petite brise de noroit.
Nous nous dirigeons vers le bord du quai, M. Skogmo prend une photo du fier navire dont il sera le parrain dans quelques instants. Il monte ensuite à bord, accueilli par Marc qui lui présente les bénévoles ayant œuvré à la construction. Il est attentif aux explications techniques du chef de chantier et prend rapidement la mesure du travail accompli. Le résultat est remarquable. Il le dira plus tard dans son discours « le Dreknor est la plus belle réplique du Gokstad » le compliment avancé par les spécialistes du musée d’Oslo, relayé par M. Skogmo, sera salué par des applaudissements de la nombreuse foule, massée sur les bords du quai. Pour l’heure, la parole est à Nathalie dont l’intervention très applaudie également retrace avec talent toute l’aventure de ce magnifique projet. Je filme l’intégralité de son discours, je ne veux pas en perdre une miette. Les élus prennent la parole et la Normandie retrouve sa fierté à plusieurs reprises, les liens ancestraux avec le Nord sont évoqués avant que Monsieur l’Ambassadeur n'intervienne à son tour. L’émotion commence à devenir palpable et Nathalie, à l’issue de son intervention, lui passe la poterie contenant la cervoise. Le plat bord à tribord est copieusement arrosé, le pantalon de son Excellence reçoit quelques gouttes, les applaudissements fusent…
La magnifique sculpture de Dreknor exécutée par Mathieu est remise à M. Skogmo. Nouvelle séance de photos. Belle interprétation de l’hymne norvégien par l’école de musique de Cherbourg suivi de « ma Normandie » les cuivres étincellent sous le soleil et s’harmonisent avec la couleur miel du pont en bois de pin. Marc remet une bouteille de Calvados à M. Skogmo, souvenir incontournable lorsqu’on passe en terre normande. Quelques moments plus tard, je recueille ses confidences sur le quai, « c’était une belle cérémonie » l’homme très affable, est peu bavard et ces mots prennent soudainement tout leur poids alors que nous nous dirigeons vers la mairie de Cherbourg.